Dans les prairies de l'Agro-Bio Tech Gembloux, des moutons portent de curieux appareils sur le cou. Des boîtes qui capturent toute une série d'informations : position de la tête, position GPS, etc. Compilées, ces données permettent de comprendre le comportement de l'animal. Ce dispositif, c'est Jérôme Bindelle, professeur et chercheur à l'Agro-Bio Tech de Gembloux, qui l'a mis au point.
De la terre à la tech
Tout est parti d'une question : comment remettre les animaux en pâture à l'époque où l'agriculture tend à se densifier et la pratique à disparaître? La réponse du professeur en gestion des pâturages : par la technologie. C'est ainsi que, en 2015, Jérôme Bindelle équipe des vaches et des moutons de smartphones, puisqu'ils embarquent la technologie qui permet de calculer la position de la tête des bêtes, leur déplacement et leur position. Cela permet de savoir quand mange l'animal, à quelle fréquence et surtout où sur une parcelle de terrain.
Mais pour enrichir ces informations, c'est d'un autre outil technologique dont l'équipe de recherche a besoin : des drones. Équipés d'un appareil photo et d'un capteur qui voit dans une large gamme du spectre de la lumière, ceux-ci survolent les parcelles de terrains où paissent ces bêtes et permettent d'étudier avec précisions les zones préférées pour le pâturage et l'évolution de la végétation avec une précision extrême.
Le comportement de l'animal et l'évolution de la végétation, deux choses que le chercheur peut à présent étudier mais dont la recherche n'a pas encore permis de révéler ce que leur combinaison permettait. La recherche est encore aujourd'hui concentrée sur l'amélioration du dispositif placé sur les bêtes pour le rendre plus robuste, améliorer son autonomie ou encore la précision de ses capteurs.
Comment éviter les dérives?
À terme, cette recherche permettrait d'adapter les parcelles de terrain à pâturer aux animaux et non l'inverse, tel que le démontre aujourd'hui l'élevage. Jérôme Bindelle imagine, pourquoi pas, placer des barrières virtuelles pour fermer certains espaces dont la végétation doit se reconstituer. Là encore, la finalité de cette recherche soulève de nombreuses questions : comment rapprocher l'éleveur de ses bêtes si c'est au travers d'un écran de technologie? Comment éviter que l'industrie ne s'empare d'une telle innovation sans enfermer les agriculteurs dans un environnement qu'ils ne maîtrisent pas? Autant de questions que la recherche s'attèlera à résoudre.
Florentin Franche - Images : Samy Lamloum